Les cercles d’investisseurs du monde entier vouent un culte à ses prévisions depuis qu’il avait pressenti le krach boursier de 1987: Felix Zulauf est un peu le «Warren Buffett suisse». Dans une interview accordée au quotidien «NZZ», il explique que la politique douanière de Trump l’inquiète bien moins que l’endettement de l’Europe.
Felix Zulauf doute que l’Europe soit préparée à la fin de la mondialisation. Son raisonnement étant que l’UE présente une structure centralisée et que le continent, «champion de la réglementation», bride la concurrence. Certains pays comme la France et l’Autriche sont devenus de facto ingouvernables sur le plan politique. Et l’Allemagne se trouve en bonne voie pour les rejoindre.
Faillites d’État en vue?
Felix Zulauf dénonce sans détour: «La dette de l’Allemagne dépassera 100% du produit intérieur brut dans quelques années. La France atteindra bientôt 130%, tandis que l’Italie et la Grèce dépassent ce seuil. La conjoncture est aggravée par l’augmentation des dettes, financées par une politique de planche à billets en raison du manque de croissance; mais cela n’engendre guère de croissance réelle. Les généreuses prestations sociales de l’État-providence sont mises à mal et les citoyens perdent du pouvoir d’achat».
Certes, les États européens retarderont les faillites d’État aussi longtemps que possible et se financeront en faisant tourner la planche à billets. Mais la faible croissance et le vieillissement de la population aggravent le risque d’insolvabilité, selon Felix Zulauf.
Focalisation sur les intérêts nationaux
«L’histoire économique nous montre que les grands endettements ont invariablement entraîné des perturbations sur les marchés financiers, et souvent des faillites. Au cours des 200 dernières années, l’Autriche-Hongrie, l’Espagne, l’Allemagne, le Portugal ou la Grèce ont fait faillite plusieurs fois, et l’Italie une fois. Rien de nouveau sous le soleil, sauf que nous n’y sommes plus habitués depuis la Seconde Guerre mondiale; excepté quelques cas dans les pays en développement. Mais le problème arrive maintenant en Europe, conséquence d’une mauvaise gestion et de dépenses supérieures aux budgets disponibles, notamment depuis la chute du mur de Berlin.»
Sa conclusion: «La fin de la mondialisation signe le début de la fin de l’UE dans sa forme actuelle. Les pays européens se focaliseront à nouveau sur leurs intérêts nationaux.»
L’avis d’autonomiesuisse: Compte tenu de cette situation, il serait contre-productif pour la Suisse de s’associer avec l’UE simplement parce que celle-ci s’est vue imposer temporairement des droits de douane américains moins élevés. D’autant plus que l’administration Trump ne considère pas l’UE comme un partenaire d’égal à égal, mais privilégie les discussions pays par pays. En ces temps de turbulences, la Suisse doit se concentrer sur ses propres atouts et les mettre en avant face à la concurrence: démocratie directe, ordre économique libéral et grande capacité d’innovation.