Giorgio Behr: «Pourquoi l’économie n’a pas besoin de traités avec l’UE»
Le professeur Giorgio Behr, entrepreneur, coprésident d’autonomiesuisse et président du conseil d’administration du groupe Behr Bircher Cellpack (BBC), fait autorité en matière d’exportation. Ses entreprises opèrent dans toute l’Europe, en Chine et aux États-Unis, dans des secteurs comme la distribution d’énergie, la technologie médicale, l’ingénierie ou les capteurs. Il a également été pendant longtemps le président du conseil de surveillance de ZF Friedrichshafen, l’un des plus grands sous-traitants automobiles au monde.
Après avoir étudié en détail les nouveaux traités avec l’UE, Giorgio Behr dresse un constat des plus clairs: «L’économie n’a pas besoin de ces accords». Dans un épisode spécial du podcast «Bern einfach» (en allemand), Giorgio Behr explique au journaliste Dominik Feusi pourquoi les arguments en faveur d’un rapprochement avec Bruxelles, énoncés par certaines associations et souvent repris, ne tiennent pas.
1. L’économie n’a pas besoin d’une actualisation du MRA
L’accord sur la suppression des obstacles techniques au commerce (MRA) est entré en vigueur avec les accords bilatéraux I. «Il n’y a aucune nécessité de l’actualiser dans le cadre des nouveaux traités», clame Giorgio Behr. Si le MRA II était adopté, la Suisse devrait appliquer l’intégralité des règlements de l’UE. «La plupart des PME demandent l’homologation de leurs produits directement dans un pays de l’UE», explique Giorgio Behr. «C’est souvent moins cher qu’en Suisse. Et les administrations vous donnent des renseignements utiles sur le marché local.»
Selon Giorgio Behr, l’industrie représente environ 23% du PIB suisse, mais bon nombre de PME n’exportent pas ou ne sont que des fournisseurs. Ces PME s’alignent sur les normes ISO internationales et n’ont pas besoin d’homologation UE. «Les entreprises auxquelles le MRA pourrait profiter représentent une part négligeable», insiste-t-il.
En conséquence, pourquoi une majorité d’entreprises et de contribuables devraient-ils supporter des coûts élevés pour quelque chose dont presque personne n’a besoin?
2. La Suisse peut régler elle-même la question de la libre circulation des personnes
Selon Giorgio Behr, le rejet des accords-cadres ne signifie pas la fin de la libre circulation des personnes. «Même en l’absence de traité avec l’UE, la Suisse pourrait continuer à autoriser les frontaliers et la main-d’œuvre spécialisée venant de l’UE, comme par le passé», fait-il remarquer. À cette différence près qu’elle pourrait régler elle-même le regroupement familial, par exemple.
Selon lui, les tenants des accords-cadres auraient tendance à minimiser les coûts liés à la libre circulation des personnes et en particulier à la directive sur la citoyenneté européenne. Par exemple: «S’il y a à l’avenir davantage d’étudiants européens qui viennent étudier dans les hautes écoles suisses sans payer de supplément, cela pourrait coûter cher à la collectivité», met-il en garde.
3. Les études commandées n’ont que la valeur de leurs hypothèses
Les études Ecoplan commandées par le Conseil fédéral attribuent la réussite économique de la Suisse en premier lieu à la libre circulation des personnes. Une vision réductrice aux yeux de Giorgio Behr: «La puissance d’une économie dépend d’une multitude de facteurs. Incontestablement, les hypothèses avancées dans ces études reposent sur des fondements très fragiles.»
Sa conclusion? La Suisse doit valoriser ses atouts de manière autonome. Il en est convaincu: «Une économie suisse solide est également bénéfique pour l’Europe».